Courrier de Monsieur Bruno Marée, président de l'ASBL Les Naturalistes de la Haute-Lesse.

Publié le par Comité de défense du site d'Inzeri

Copie du rapport d'une petite prospection réalisée ce samedi 11 octobre par les Naturalistes de la Haute-Lesse.  A noter la présence de deux orchidées protégées par la loi belge.  Deux autres que celles que vous citez sur votre blog ...
Une bonne argumentation supplémentaire pour s'opposer à ce projet.

Cephalantera damasoniumSamedi 11 octobre 2008 - Prospection malacologique (et autres ...) sur le Tienne d'Inzéri, à Wellin
Bruno MAREE

Outre la poursuite de l'inventaire faunistique et floristique de notre région, l'objectif de la prospection de ce jour était d'évaluer l'impact d'un vaste projet immobilier concernant cette colline calcaire située au nord de Wellin et dont la présence constitue un remarquable écran de verdure entre la localité et le site de la carrière du Fonds de Vaulx et de l'autoroute E 411.


Le projet immobilier

Dès le mois de janvier 2006, quand le projet fut dévoilé pour la première fois, la commission de l'Environnement des Naturalistes de la Haute-Lesse s'était clairement positionnée sur cette opération immobilière et avait adressé un courrier à l'administration communale de Wellin. En voici les principaux arguments :
« Dans le cadre de l’enquête publique en cours, suite à la réunion de concertation du 16 janvier, les Naturalistes de la Haute-Lesse tiennent à exprimer leur opposition à ce projet urbanistique incompatible avec les spécificités du caractère rural de l’habitat dans la région de Wellin. L’éloignement par rapport au centre historique de la localité, l’isolement du site pressenti pour le lotissement, sa situation topographique dominante et, donc, visible de très loin, sont autant d’éléments qui plaident en défaveur du projet. Dans une commune fondant son développement touristique sur la qualité indéniable de ses paysages, conformément à un souci de respect d’un « Développement durable », il va de soi que le lotissement du Tienne d’Inzéry constituerait une dégradation irrémédiable de cet atout économique primordial de la commune de Wellin.

En outre, les travaux d’aménagements du bâti et des voiries impliqueraient forcément un important déboisement de la zone concernée, alors que celle-ci constitue un remarquable îlot de verdure formant écran, au nord de Wellin, avec le site des carrières et la proximité de l’autoroute E 411.

Si le territoire concerné par le projet n’avait pas été repris en zone à bâtir, au Plan de Secteur, il est évident que l’ensemble aurait bénéficié du statut Natura 2000, comme c’est le cas pour les tiennes jouxtant celui d’Inzéry et toute la zone située au nord. Or, cette dénomination de zone à bâtir résulte de la modification légale, en 1997, des zones prévues initialement comme Parc résidentiel. Il en résulte que l’opération n’a pas nécessairement tenu compte des spécificités locales inhérentes à un site sensible comme celui dont il est question ici. Ainsi, l’annexe VIII de la Liste des habitats naturels prioritaires visés à l’annexe 1 de la Directive 92/43/CEE présents sur le territoire de la Région Wallonne désigne la zone concernée sous l’appellation de « Pelouses sèches semi-naturelles et faciès d’embuissonnement sur calcaire » (Code 6210). La colline était encore occupée par une plantation de pins jusqu’à la fin des années 1980 et fut réouverte, depuis lors, ce qui offre un nouveau potentiel biologique évident pour l’ensemble du site.

Enfin, la Carte d’Evaluation biologique de la Belgique publiée par le Ministère de la Santé publique et de la Famille, en 1985, attribue le statut de « Zone de grande qualité biologique » à la totalité du Tienne d’Inzéry. De plus, au bas du versant sud, figure même une petite « Zone de très grand intérêt biologique » qui risque d’être fortement perturbée par les aménagements d’accès au lotissement projeté.

Ces différents arguments nous incitent à réitérer notre opposition au projet présenté à l’enquête publique. Nous espérons que les décideurs auront, eux aussi, le souci de défendre la richesse du patrimoine naturel de notre région et le bien-être de ses habitants. »

Après ce rappel des circonstances et des motivations de notre prospection de ce jour, l'équipe constituée d'une douzaine de membres, parcourt l'ensemble du site en multipliant les observations malacologiques, mycologiques et entomologiques, en fonction des rencontres ...

Les mollusques

Du côté des mollusques, signalons la présence de trois clausiliidés : Clausilia rugosa parvula, Cochlodina laminata et Macrogastra rolphii. Le premier colonise les rochers calcaires du versant ouest de la colline surplombé par quelques pieds de genévriers. Les deux autres occupent les litières de l'ensemble du petit massif forestier. Sur le versant sud, principalement en lisière, nous reconnaissons Helix pomatia (le Bourgogne) et Cornu aspersa (le petit-gris) qui semblent cohabiter pacifiquement, de même que Cepaea nemoralis bien présent partout, à proximité des habitations et au pied des haies, en compagnie de Cochlicopa lubrica, une espèce dénichée au pied d'un massif d'orties. Parmi les limaces, nous observerons les très communes Arion hortensis et Arion subfuscus. Enfin, Discus rotundatus, Vitrina pellucida, Oxychilus cellarius et Aegopinella pura complètent notre sommaire inventaire malacologique qu'une prospection plus assidue étofferait davantage. Car, curieusement, les botanistes et les mycologues jugent la progression des malacologues un peu lente ! C'est le monde à l'envers ...

Les champignons

Les mycologues sont à la fête :le sous-bois abrite une poussée fongique qui a profité des pluies de la semaine dernière et du retour d'une température assez douce. Nous laisserons le soin aux mycologues de service de dresser la liste des espèces déterminées et nous nous contenterons de signaler l'abondance de Tricholoma cingulatum, un Tricholome « ceinturé » qui doit son nom à la présence d'un anneau menbraneux sur le pied, une « zone annuliforme cotonneuse » (dixit Courtecuisse). C'est un comestible..., mais une autre observation « gastrono-mycologique » clôturera cette matinée de prospection, comme cela sera signalé plus loin...

Les orchidées

Sur le tienne d'Inzéri, menacé d'urbanisation frénétique, les botanistes s'intéressent davantage à deux orchidées bien représentées et pour lesquelles la réalisation du projet immobilier signifierait la disparition inéluctable. Ils repèrent Epipactis helleborine, une espèce sciaphile, et, beaucoup plus rare encore, Cephalantera damasonium, une très belle orchidée appréciant aussi l'ombre des sous-bois. Ces deux espèces sont intégralement protégées en Belgique et souffrent principalement de la disparition de leurs biotopes. Le lotissement du Tienne d'Inzéri marquerait, une fois de plus, la disparition d'un milieu accueillant pour notre flore indigène !

L'insecte du jour...

Enfin, une petite observation entomologique : c'est une punaise qui a adopté la veste très naturaliste de Pierre. Nous déterminons Notostira elongata, une espèce assez commune dans les herbes hautes des prairies et... sur la veste de certains naturalistes.

Le Sourd d'Ave

Pour terminer cette matinée en beauté, l'équipe décide aussi de parcourir le site du Sourd d'Ave, la résurgence des eaux du Ri d'Ave, en aval de la carrière du Fonds des Vaulx. Les macroinvertébrés aquatiques y sont rares, signe assez évident d'une pollution des eaux du ruisseau. Seules, quelques sangsues et une importante population de gammares, ces petites crevettes d'eau douce, occupent le substrat caillouteux de la résurgence. Nous y repérerons quand même trois mollusques dulcicoles : Lymnaea ovata, Ancylus fluviatilis et Potamopyrgus antipodarum.

Enfin, pour prépaper le repas de midi, la découverte d'une grande station de Limacella guttata comblera d'aise les mycologues gourmands et chacun repartira avec de quoi s'offrir une bonne fricassée, un toast ou une omelette de savoureux champignons offerts par la nature... quand on lui laisse la place pour être généreuse. Tout à côté de ces champignons, sous un fragment de bois mort, nous observerons encore Limax cinereoniger, une de ces limaces mycophages ... elle aussi !


Un souhait ...

Que nos descendants puissent encore profiter de la beauté, de la richesse et de la quiétude de ces milieux semi-naturels préservés, jusqu'à ce jour, de la vanité humaine !

Bruno MAREE                                                      
Les Naturalistes de la Haute-Lesse ASBL - président
27, Rue des Collires   -   5580    HAN-SUR-LESSE
Tél : 084 377777   -   e - mail : brumaree@skynet.be
Site internet : http://www.naturalistesdelahautelesse.be

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